Algérie: condamnations honteuses

Algérie : condamnations honteuses de Kamira Nait Sid et des détenus politiques Kabyles

 

Le procès de Kamira Nait Sid, coprésidente du Congrès Mondial Amazigh (CMA), Bouaziz Ait-Chebib, membre de l’Union pour la République Kabyle (URK) et Slimane Bouhafs, citoyen kabyle de confession chrétienne, s’est terminé ce 16 décembre 2022 au petit matin au tribunal criminel de Dar-El-Beida, près d’Alger.

Kamira Nait Sid a été condamnée à cinq ans de prison ferme et 100.000 Dinars d’amende, Bouaziz Ait-Chebib et Slimane Bouhafs, à trois ans de prison ferme et 100.000 Dinars d’amende chacun.

 

Ils étaient poursuivis pour appartenance à une organisation terroriste, sur la base de l’article 87 bis du code pénal algérien. Or cet article a été jugé non conforme au droit international par divers organes des Nations Unies dont le Comité des droits de l’homme de l’ONU qui a souligné en 2018 que la définition algérienne du terrorisme était susceptible de permettre «la poursuite de comportements qui peuvent relever de la pratique de l’exercice de la liberté d’expression ou de rassemblement pacifique». Le Comité a donc demandé au gouvernement algérien de modifier cet article afin de le rendre conforme aux bonnes pratiques du droit international. Mais en juin 2021, le gouvernement algérien adopte une nouvelle rédaction de l’article 87 bis qui va dans le sens opposé aux recommandations du comité des droits de l’homme de l’ONU.

 

Par ailleurs, le cas de Kamira Nait Sid a été examiné le 1/04/2022 par les experts du Groupe de Travail des Nations Unies sur la détention arbitraire* qui ont jugé que la coprésidente du CMA est une défenseure des droits humains et de son peuple, que l’accusation de terrorisme est dénuée de tout fondement juridique et que par conséquent Kamira Nait Sid est en situation de détention arbitraire. Dans une lettre adressée au gouvernement algérien, l’ONU a donc demandé la libération immédiate de Kamira Nait Sid et la réparation des préjudices qu’elle a subis.

 

Le cas des autres détenus politiques Kabyles est semblable à celui de Kamira Nait Sid et par conséquent ils auraient dû être libérés sans délai et sans conditions.

 

Durant le procès, les avocats de Kamira Nait Sid et des autres prévenus ont tous souligné les violations des lois et des procédures de justice, notamment la non prise en compte par la justice de l’enlèvement et la séquestration de Kamira Nait Sid pendant sept jours par des agents des Brigades de Recherche et d’Intervention (BRI) de la police ; la prise en compte de faits antérieurs à la promulgation de la loi, la prise en compte d’aveux obtenus grâce au recours aux menaces, aux intimidations et à la torture, des accusations et des condamnations sur la base de l’article 87 bis du code pénal, jugé anti-constitutionnel et maintes fois dénoncé par les organes pertinents de l’ONU ; des accusations sans preuves matérielles, l’interdiction faite aux prévenus et à leurs avocats de parler en langue amazighe, pourtant langue officielle en Algérie.

 

Compte tenu de ces graves manquements aux principes de base de la justice, le Congrès Mondial Amazigh rejette en bloc et condamne avec force les arrestations, les emprisonnements et les condamnations de Kamira Nait Sid, Bouaziz Ait-Chebib, Slimane Bouhafs et de tous les Kabyles punis pour avoir exercé leur droit et leur liberté de s’exprimer pacifiquement.

 

Le Congrès Mondial Amazigh salue la posture digne et courageuse de sa coprésidente et l’assure de son total et indéfectible soutien. Le CMA agira par tous les moyens possibles afin que les responsables algériens rendent des comptes, que la justice triomphe et que la dictature algérienne soit sanctionnée au niveau international et exclue du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU.

 

*https://www.ohchr.org/sites/default/files/documents/issues/detention-wg/opinions/session93/2022-10-10/A-HRC-WGAD-2022-15-AdvanceEditedVersion.pdf

 

Paris, 4/12/2972 – 16/12/2022

 

Le Bureau du CMA